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Sommaire

Porto(1)
Guimaraes
Braga
Gerês
Viana Do Castelo
Porto(2)

Porto(1)

    C'est avec une heure de retard que le bus quitte le parking. Il faut croire qu'à 22h la rocade bordelaise est encore encombrée! Étant donnée la durée du trajet je ne suis pas à une heure près. A peine parti, déjà immergé. Le bus est rempli. Moi aussi car j'ai profité de l'heure tardive pour me goinfrer dans le train. Je suis quasiment le seul français à bord et n'ai au moins pas de doute sur la destination qui m'attend, dans un car de portugais pour certains habitués à faire le trajet entre la Gironde et nord du Portugal. Les sonneries virulentes des portables et les conversations qui en suivent ont le seul avantage de m'immerger aussi dans la langue.  Je vous remercie de cette élégante discrétion. Bouchons vissés dans les oreilles je me coupe de ces nuisances auxquelles succéderont les dialogues d'un film anglophone avec Juliette Binoche. Le constat est sans appel : il est temps de faire quelque chose et de remplacer mes petits cylindres de mousses aux performances plutôt dégradées. Autre subtilité, l'odeur de pieds de mon jeune voisin à qui j'ai eu la sage idée de demander si la place était libre. Ce n'est que trop tard que je réalisai que ses orteils étaient à côté de ses chaussures. Je vous salue. L'article de Jupé que j'achève en quittant la grande métropole achève aussi de me faire vaciller. Bonne nuit. J'ajoute une touche de « french touch » en plaquant sur mes yeux mon masque de nuit d'une compagnie aérienne. Le chauffeur se tient quant à lui éveillé avec une musique rythmée que mes bouchons ont choisi de me faire profiter.

7H00. Le chauffeur fait de longs remerciements tout en annonçant la pause petit déjeuner. Des applaudissements s'en suivent. Sont-ils tous de la même famille ? Il nous laisse. Ambiance décontractée et joviale au réveil. Je prends un café au milieu de portugais et espagnols qui ont commandé croissants et chocolatines. Le temps est à l'observation. Je m'éveille. Le soleil en fait de même. Le bus est un long déplacement qui apporte le voyageur sur un étroit ruban d'asphalte qui se déploie. Le paysage se modifie. Pas moi. Je suis déjà loin de ma base arrière. Une nuit m'en sépare. Une langue aussi. Nouvelle pause. Le bus s'en va. Pas nous. Il reviendra un long moment plus tard le ventre rempli de carburant. Encore des heures qui s'étirent avec les arrêts dans l'arrière pays. Enfin le Douro ; bientôt la gare de bus. Porto, cité portuaire au bord de l'atlantique dévoile enfin son architecture au toitures tuilées. Le plus difficile lorsqu'on a passé une nuit en sommeil alternatif est de prolonger les heures dans une ville à découvrir. Il faut prendre le temps. Mon appareil photo restera dans le sac. C'est un rituel bien établi. Avant de lui donner le droit de mémoriser et pixeliser ce qu'il pourrait voir, je commence par faire du 
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repérage, baliser le terrain, m'imprégner d'une atmosphère, avant de figer le décors. Les pentes ne font pas mon affaire malgré mon sac léger. Mon dos transpire sans tenir compte des pauses que je lui procure. Entre le rempart de fortification et le fleuve,une promenade bordée de commerçants et d'artisans donne une ambiance océanique où j'ai envie de musarder. Le linge sèche le long des façades. Le tramway s'affaire à traverser le Douro. Le funiculaire joue au funambule. Je m'arrête boire un verre. Je cherche la ligne F. Je monte. J'hésite. Je descends. J'attends la ligne F. La A insiste. Je monte. J'arrive malgré tout. Très bien!
   
 


   
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Matinée humide qui s'annonce après une nuit silencieuse à l'écart de l'agitation du centre mais à deux pas grâce au métro. Les jardins du palais de Cristal sont l'endroit tout trouvé pour poursuivre un éveil au calme. Des espaces de verdures proéminentes et étagés débouchent sur des panoramas superbes de la ville. Les oiseaux en liberté sont juchés sur les statues  Les reflets du soleil sur le Douro donnent un éclat métallique. Un paysage d'aquarelle se dessine dans les collines bâties de la ville. C'est une invitation à entrer dans le romantisme avec un musée dédié dans un manoir au décors reconstitué d'un intérieur bourgeois du 19ième siècle.
 
  L'ancienne prison a été reconvertie en musée de la photographie. Malheureusement je serai bloqué au parloir du rez de chaussée car le bâtiment en restauration ne permet pas les visites. Seules les salles du bas sont accessibles en franchissant les grosses portes renforcées qui rappellent clairement qu'ici était un lieu duquel on ne devait pas sortir. A présent s'y tient une exposition mettant des corps, celui d'un homme, d'une femme, puis les deux réunis sans entrave, dans des gestuelles photographiés ou mises en  vidéo. On y voit notamment des scènes juxtaposées de ces corps confinés dans des cubes qui délimitent leur espace. Éloge des corps libres de se mouvoir mais prisonniers de structures oppressantes. La marge de manoeuvre du couple n'en est que plus limitée. La remise en cause appartient à chacun mais trouver l'espace nécessaire apparaît plus que jamais fondamentalement vital, au péril de voir deux êtres sensés se porter, se déconstruire. Une animation réaliste simule ces mêmes corps mains liées dont les photos sont déversées sur un tapis comme ceux de récupération des bagages d'avion, rejetées en instantanés et glissant sur ce tapis roulant avant d'être avalées par une broyeuse à papier qui les déchiquette. Ne serions nous que des êtres aliénés condamnés à suivre provisoirement la ligne du temps? Troublante évocation alors que je viens de terminer un article sur l'incarcération et sur ce qu'elle produit de radicalisme tant bien que la volonté initiale tend à un but opposé. Lien troublant également que ces structures d'acier renforcé qui me cernent et m'empêchent d'accéder aux trésors qu'elles protègent et aux collections d'objets originaux, appareils et sténopés entre autres, ancêtres de nos caméras d'observation. Il aura bien fallu d'abord des pauses inconsidérées pour modeler des formes consentantes avant que ce soient des cerveaux modelés qui ne deviennent des objets épiés sans consentement.

   
                
Paradigme de la notoriété. Comment transformer un lieu emblématique, chargé de symbolique et doté d'un sens artistique et architectural épatant en un théâtre rocambolesque ? Les mots sont forts. L'arrogance peut aussi l'être. Illustration. La librairie « Libraria Lello »est un lieu atypique marqué en gras dans tout les guides touristiques comme un passage obligé. C'est un lieu incontournable d'un Porto fier aussi de ses illustres écrivains Eça de Queiroz ou Guerra Junqueiro, hébergés dans un temple de la littérature où les plafonds en plâtre peints donnent l'illusion d'être en bois verni. Un kiosque situé sur le trottoir d'en face de l'entrée voit une file  incongrue de visiteurs prêts à débourser 3 euros pour obtenir le droit d'entrée inévitable. Je fais la queue, comme les autres, bien que terrifié par le spectacle affligeant que je m'impose. C'est la bibliothèque d'Harry Potter. JK Rolling doit s'en frotter les mains. D'ailleurs à peine entré je tombe nez à nez avec une pile de ses livres. On fait un bond en arrière dans ce décors léché qui jette l'évocation de cabinet de recherche où on prend à imaginer Magellan en pleine travail de préparation et de recherche avant d'en découdre avec sa circumnavigation. Lutter contre les visiteurs, cane à selfi tendue, sourire forcé pour figer l'éternel trait au marqueur souligné dans le guide papier, occultant pour certains, je n'en doute pas, la nature même de l'antre qu'ils visitent. Où s'alignent les plus belles plumes autochtones et mondiales, se mêlent les idées les plus profondes et les poésies les plus amères, il ne subsistera qu'une série interminable de clichets identiques. Je me refuse de participer à cette mascarade et d'en prendre ne serait-ce qu'un. 

    L'art interroge et soulève des questionnements qui dépassent probablement le concept initial. Là où le contemplateur s'approprie l'oeuvre. Je remonte la ligne F du métro, cherche le bus 203 que m'indique un retraité édenté polyglotte peu avare de renseignements. Je brave une file d'attente improbable devant la caisse de la fondation Serralves où se trouve le musée d'art contemporain, abrité dans un bâtiment moderne aux salles blanches immenses et au sol stratifié. Devant les traits naïfs, esquisses tracés sur une feuille de papier quadrillé identique à celle sur lesquelles je griffonne des notes, je me dis que n'importe qui aurait pu avoir sa signature apposée sur cette œuvre. De ce constat vient mon erreur, car si justement n'importe qui aurait été capable de la produire, personne d'autre que l'artiste ne l'a exécutée. De cette représentation du « rien » apparaît toute l'unicité de l'être, sa personnalité propre et son commun irremplaçable. L'idée la plus simple émane parfois du génie. A moins que chacun ne soit génie!

   
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Une surface énorme de murs peints en orange sur lesquels sont fixés des néons éclairés horizontaux et verticaux par centaines forment des figures géométriques indéterminées. Où veut nous conduire l'artiste ? La lumière et la couleur happent mon attention, tiraillée simultanément par la vaine démesure du nombre de lampes et de câbles électriques nécessaires à l'installation. Ces derniers ont été produits à des fins de contemplation et consomment en continu une énergie que le visiteur par son passage en guichet contribue à payer. Quelle en est le but ? Le mythe de Sisyphe revisité version moderne art. Illusion ou absurdité ? La subjectivité au service de l'art ou bien le contraire.

    Une artiste conceptuelle est assise à côté de moi tandis que je contemple sans fascination des toiles qui ne me parlent pas. Elle me demande si je rédige un article sur l'exposition, ce à quoi je lui répond par la négative.
« Etes vous artiste ? »
« Non plus, je ne suis qu'un simple voyageur »
« Musicien ? »
« A temps perdu »
En effet je ne suis qu'un simple voyageur qui rend compte de quelques impressions au sujet de ce qu'y m'interpelle, ou plus exactement de ce que l'inintérêt procure comme approche. Je ne suis pas artiste mais je l'ai à priori laissé paraître. Nous sommes tous artistes. Je suis un artiste !

    La pluie s'est invité et cette fois s'abat volontiers sur Porto, et me convainc d'aller m'abriter. La température est descendue et tandis que l'orage gronde et la foudre s'abat non loin, je rentre Rue Nau Vitoria. J'ouvre « La Guerre et la Paix », pour affirmer les contraires. J'imagine Saint Pétersbourg qui doit bientôt se revêtir de ses premières épaisseurs blanches . Tandis que je fais une pause j'ouvre la porte de la salle de bain et tombe en présence...d'une Russe.
« Ah ! Excusez moi... ». Comme quoi il suffit d'y penser ! Plus tard dans la cuisine, nous voici plongés dans des élucubration sibériennes sous l'oreille émerveillée autant qu'apeurée de son compagnon Brésilien.
« Spokonoi notchou » ; je vous souhaite une bonne nuit. Et réintègre mon cabanon à l'abri des tempêtes nocturnes.
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Portugal
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Guimaraes

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    La pluie a cédé la place au soleil. C'était annoncé mais il faut en attendre la vérification en ouvrant les stores. Je range mes affaires étalées de façon incongrue sur le lit jumeau au mien. Jean Noël, mon hôte, me rejoint pour prendre un café dans la cuisine. C'est un français - pardon un alsacien- qui s'est amouraché d'une portugaise. Du coup sa vie a légèrement perdu en latitude pour venir goûter de la relative douceur de Porto, et sûrement aussi du Porto. Il est guide touristique dans la région, autant dire qu'il connaît bien sa ville et me donne quelques tuyaux qui m'économisent du temps. Nous bavardons. Cristina, son amie que j'ai rencontrée le jour de mon arrivée est à l'image des portugais que j'ai rencontrés. Aimable, souriant, serviable. Dans ces conditions que faire d'autre que remercier et passer sa route l'âme légère. Quelques projets communs sont discutés avec Jean Noël, avant qu'il ne me dépose à la gare des trains de Campanha. Le temps d'acheter mon billet au guichet qui se libère devant moi, de demander à une passagère où se fait la validation, que le train est déjà à l'arrêt, portes ouvertes prêtes à avaler les voyageurs. Je saute à l'intérieur. A la seconde prêt! 1H15 suffiront pour rejoindre Guimeraes. Lorsque le train s'arrête je suis surpris de voir la patience des passagers. En France, par habitude, dès l'approche d'une gare tout le monde se lève, enfile les vestes, retire les valises. Ici, jusqu'à l'immobilité totale du wagon et l'ouverture des portes, personne ne bouge. A se demander s'il ne s'agit pas d'un arrêt factice. Cette tranquillité est apaisante, surtout après l'agitation de Porto où règne un mouvement permanent. Guimaraes donc. 4ième ville du pays parait-il. Mais de surcroît classé à l'Unesco. Parce qu'Henri de Bourgogne en avait fait la capitale, la ville est souvent considéré comme le berceau du Portugal. Mais point ici de bébé gémissant qu'il faut calmer d'un balancement régulier. Tout est calme, paisible dans le centre historique que l'on parcourt à pied, entre places de cachet et ruelles enchevêtrées. Au nord de la ville  l'ancien château et ses jardins qui attirent les amoureux domine, tandis qu'un funiculaire hisse les paresseux 400mètres plus haut pour le quartier de Penha. Assiette de porc et pomme de terre,verre de « super bock », la bière nationale, et un pavé de 900 pages entre les mains pour faire une pause dans mes longues pérégrinations sur d'autres pavés qui jonchent les sols sans discontinuité. Des jeunes boivent un verre sur la terrasse d'une charmante place à l'atmosphère d'un village ralenti par des décennies de temps ancien. Derrières les portes ouvertes des façades colorées de vieilles dames, vestes en laine boutonnée, observent le spectacle d'une fin de journée. Les cafés et les restaurants désemplis vivent au rythme lent de cette grande endormie.
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Portugal

Braga

  Plier bagage, marcher en direction de la gare de bus, tandis que barbiers et cireurs de chaussures ont déjà installé leur matériel d'antan.Courte transition vers Braga. Des églises en veux tu en voilà, aux décors riches. De grandes avenues qui attestent que le nord du Portugal ne veut plus rester coincé dans les années 70 mais que son développement est en pleine essor. Bien sur cela se traduit aussi par des allées de marques franchisées, les plus à la mode. Mais les élégantes rues pavées  par les infatigables artisans dans le bâtiment et les parterres fleuris avec abondances et convenance ne peuvent que plaire au passant. La visite d'une ancienne demeure seigneuriale...est d'un grand intérêt pour faire un saut dans le passé et revisiter la bourgeoisie portugaise du 18ieme.
A quelques kilomètres Bom Jésus s'érige au sommet d'une colline que 600 marches de cardio permettent d'atteindre. Une œuvre en soi et une perspective étonnante. Rassurons nous il existe un funiculaire semblable aux tramway de Porto qui grimpe en quelques minutes. Vue panoramique, allée fleuries et parc en pentes offrent d'agréables promenades, et de belles lumières sur la pierre et la végétation lorsque le soleil commence à décliner. 

    Ce matin j'ai deux heures à tuer ; le bus que je dois emprunter étant moins matinal que je ne le pensais. Dans les premières heures de la matinée, le soleil généreux rayonne avec virulence. La lumière éblouissante chauffe la peau. Les carillons des églises chantent des airs qui renforcent la douceur de vivre que les doux moments à la terrasse d'un café accompagnent. Un lituanien que je croise me fait part de cette douceur;ce n'est pas peu dire lorsqu'on connaît le rythme lent de la Baltique. De jeunes jardiniers s'activent dans les parcs pour nettoyer et préparer les plates bandes. Des compositions florales me font de l'œil, des rosiers me charment de leur têtes colorés. Cette fois mon bus entre en quai. J'y grimpe après avoir acheté une fine escalope de porc pané et des pastels de nata pour la route.

                
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Gerês

J'entre à présent dans le parc national qui fait frontière avec l'Espagne:le parc de Penada Geres. La route s'élève un peu. Des élèves élèvent le ton lorsqu'ils emplissent subitement le bus quasi-vide. Gérês, ville thermale, sous une chaleur presque brûlante m'offre une chambre avec vue sur les montagnes boisées. 

  Gérês est le terminus du bus. La route continue, se faufile entre les montagnes du parc et file jusqu'à l'Espagne, certes, mais sans véhicule il est bien évident que la route s'avère trop longue. Il faudra donc se contenter s'arpenter les forêts qui ceinturent la petite ville thermale aux eaux réputées pour les soins. Si les hôtels s'alignent sur les hauteurs du village, les curistes à cette saison se font rares. Pourtant il semble y a voir malgré tout une activité dans le centre. Un parc s'étire longuement le long du cours d'eau qui borde la route en remontant au nord de Gérês. Il n'est pas ouvert au public semble-t-il pourtant, même si la caisse est fermée, le portail est grand ouvert. Je m'y faufile furtivement, suivant le long bandeau étroit le long duquel un parcours santé s'échelonne, un parc d'aventure dans les arbres apparaît plus loin. Un étang, puis des bassins d'eau. Un complexe qui doit s'animer à la période estivale mais s'est déjà endormi à la saison automnale. Qu'importe, ce n'est pas une cure thermale, ni une balade dans les cimes qui m'ont attiré ici. Aussi, malgré les possibilités limités de découverte du parc, je remonte la route jusqu'à un embranchement d'où démarre un sentier balisé. Fortes pentes pour rejoindre les hauteurs et quitter les forêts d'épineux puis atteindre un plateau où s'ouvrent les collines environnantes dans un décors planté de rochers. Le paysage me procure cette sensation agréable de déambuler sur un terrain où les distances ne comptent plus. Plus loin je m'attarde longuement au passage de chèvres dont les déambulations dans les herbages activent les clochettes multi-sonores. C'est la fin de la période d'estive. Bientôt les troupeaux rejoindront la vallée. Je poursuis mon itinéraire à une altitude légèrement inférieure à 1000m. A la Piedra Bella un vertigineux panorama dévoile la vallée de Gérês et le grand lac qui le précède. C'est à cet endroit que je croise la route d'une Chilienne venue se perdre dans un coin perdu du globe. Je l'interroge sur sa destination de voyage. Pourquoi choisir le Portugal lorsqu'on vient d'un pays où les paysages dominés par les andes et les parcs sauvages à hauteur de démesure ? « J'ai de la famille brésilienne » me répond-elle.
Voici une justification suffisante. A la recherche du balisage nous ferons un dernier tronçon de sentier ensemble. La journée est loin d'être terminée, alors je flâne après une bonne douche. A la nuit venue je partirai manger une franchisana, sorte de croque monsieur arrosé d'une sauce abondante, accompagné de frittes. Pas très diététique peut être mais un plaisir de le savourer dans un bar local.
                
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Viana do Castelo

    Je quitte ce matin les moyennes altitudes, laissant derrière moi les collines qui s'étendent au soleil, les sommets du nord qui s'élèvent en même temps que la route,et plonge au niveau de la mer pour Viana Do Castelo. Les mouettes s'invitent et annoncent que l'altimètre a cédé du terrain. La pêche de la morue a connu ses heures glorieuses à Terre Neuve et la ville océanique est née de ces succès. Ruelles de pierres et avenues larges se mélangent dans une atmosphère ancienne, où dansent des églises et des bâtiments à l'architecture  élégante. Toujours le calme. Je rejoins l'océan. La marée basse découvre un fond rocailleux où quelques pêcheurs ramassent des crabes qui s'enfuient à la vitesse de l'éclair. Le soleil descend et la lumière rougeoyante annonce la clarté qui s'estompe. L'air du large rafraîchit et des frissons me font trembler. Je quitte les bordures herbeuses qui surplombent la plage et rejoint le centre à l'atmosphère lourde d'un air chaud chargé d'humidité.

    J'ai décidé de rester dans la sobriété des moments calmes pour stopper la mécanique du mouvement. Le sac léger sur l'épaule je descend m'installer à la devanture d'un petit troquet qui donne sur une ruelle où le passage fluet témoigne d'une activité lente mais réelle. Mon premier café n'est pas loin mais je commande un plat du jour pour m'humecter encore des saveurs de morue dont le paradoxe tient au fait que malgré son infaillible présence au patrimoine culinaire du pays, elle n'y est pas pêchée dans ses eaux. Ne soyons pas trop regardant ; le traditionnel a souvent des encrages culturels plus profonds que ceux des bateaux restés à quais. Ces excès de lenteur sont apaisants et redonnent au temps ses lettres de noblesse. Ils sont la source de productions que je dicte à la pointe du stylo et au tapotement du clavier. Je noircis et bleuis des pages quadrillées de papier, d'autres de fichier texte qui bouffent ma mémoire d'ordinateur et libère la mienne. Je stocke les données de mon disque dur cérébral sur celui de mon disque dur numérique. Mais ces flâneries ont leurs revers. La décharge mentale s'accompagne d'une décharge physique. L'effort intellectuel est une contre-indication à l'effort physique. J'en ressens ce besoin d'une nourriture artistique pour me recharger et d'une dépense physique pour me ressourcer. Tout vient à point. Tandis que j'ai abandonné mon sac dans ma nouvelle chambre et pars en quête d'horaires de trains et de bus pour préparer ma libération à l'étreinte de Viana Do Castelo, un grand hall au murs blanchis me happe pour contempler une exposition d'œuvres d'artistes locaux. Huiles et aquarelles pour l'essentiel tapissent les murs. Deux peintures retiennent mon attention, aux lignes épurées pop art pour l'une et fines et 
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sobres pour la seconde. Je n'aime plus le trait grossier, brut, accrocheur ou tiraillé aux attributs confus. Je lui préfère la grâce soignée et la justesse du détail caché. J'y recherche l'effort qui hisse non pas vers la performance mais vers la libération. Mon deuxième dilemme quand à lui trouve aussi sa réponse. L'église Sainte Lucie qui me narguait hier nuit depuis la fenêtre de ma chambre, sur les hauteurs illuminées, est la meilleure des raisons à me faire tendre les muscles des jambes qui n'attendent qu'à être sollicitées dans ce qu'elles savent accomplir. Je laisse le funiculaire et prend mon courage à deux mains, ou plutôt à deux pieds, marche à marche pour grimper les quelques 600 mini paliers qui mènent à l'édifice religieux. Les hauteurs imposent d'éponger la sueur. Elles permettent de s'élever, non pas au dessus des foules pour la prendre de haut, mais au dessus des villes pour prendre du recul. Tel un félin sur son promontoire qui scrute son territoire, on zoome des sommets pour avoir une vision globale, pour ne pas se heurter aux détails sans importances. La prise de hauteur est le garant de la maîtrise, non pas en terme de pouvoir mais en terme de compréhension, pour ensuite redescendre imprégné d'un ensemble cohérent. Le National Géographique a subjectivement recensé le panorama comme le troisième plus beau au monde. Le pont Eiffel enjambe la rivière Lima qui se jette dans l'atlantique. L'océan dévoile sa langue de sable enroulée dans une baie à la connotation brésilienne. Vision éblouissante, doté d'un sens du sacré que lui voue Sainte Lucie, accentué encore depuis le sommet de l'église que l'on atteint en empruntant un escalier en colimaçon aux marches étroites  et qui offre un panorama à couper le souffle.
Sur les façades anciennes de la ruelle pavés des lampadaires suspendus en fer forgé diffusent leur lumière chaude. Le linge est étendu aux balcons. La lampe de chevet illumine un coin de ma chambre alors qu'à demi-ouverte, la porte du balcon laisse infuser dans la clarté les mélodies d'un violon qui chante dans une maison voisine. 
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Porto(2)

Re voici Porto et le Douro. Je retrouve des points de repère, la gare St Bento et ses céramiques murales, le Majestic café et son ambiance rustique, la rue Santa Catarina et ses magasins branchés, le marché de Bolhao et ses étals de fruits et légumes. J'ai rendez vous avec Jean Noël qui m'amène chez lui comme une vieille connaissance qui lui fait découvrir ses quartiers. Du balcon qui surplombe la ville du haut des trois étages, la vue panoramique embrasse l'horizon, le Douro et ses ponts. Dans le centre l'agitation bat son plein. Des flots continus d'étudiants, aux couleurs identifiés de leur université, revêtent des parures en cannettes en métal qui s'agitent comme des grelots dissonant. Autour d'eux d'autres jeunes hommes et femmes, vêtus de noir, cape au dos, encadrent les groupes. Le bizutage festif des universités ou écoles déploient les hordes d'étudiants en une foule dense et énergique. L'université de Poudlard aurait-elle envahie Porto ? L'histoire dira plutôt que l'imaginaire de JK Rooling, qui a vécu à quelques pas de ma résidence du soir, a emprunté les rituels locaux. Quelle est vivante cette jeunesse! Bien sur qu'il faut la célébrer, la mettre à l'honneur car elle est le porte drapeau de demain. Chacun devrait participer à cette fête, pour marquer jusqu'à la fin de ses jours ce trait d'union vers la citoyenneté. Ce sont eux qui entrent en piste. De Porto, Paris ou New York, l'avenir appartient à ceux qui foulent les pavés.

Porto se dévoile aussi par les hauteurs. Il suffit de s'en donner la peine et se hisser sur la partie supérieure du Pont Luis, et de longer les rails du tramway qui traverse la rivière. La Riviera d'une rive, et Gaia de l'autre se font face pour dévoiler leur beauté réciproque. Sur Gaia justement, les vendeurs étalent leurs artisanats, tandis que les visiteurs s'en mettent plein la vue, avant d'entrer dans une des caves dont la visite paraît incontournable. Celles du Porto bien entendu, dont la récolte se fait dans la vallée du Douro dans un paysage encaissée, des parcelles abruptes et un climat rude qui donne à ce vin son authenticité. La visite guidée de celle que je décide de découvrir est une histoire du vin, comptée avec la passion de la guide francophone qui en raconte aussi la difficulté des conditions de travail. Stockage monumental des les barriques anciennes, empilées dans les chais au sol de gravier, dont l'arrosage permet la régulation de l'humidité.
Des ruelles, des bâtiments, encore. Des cafés et des saveurs. Des discussions qui s'étirent. Je laisse derrière moi une idée du Portugal, celle que l'accueil, la simplicité et la chaleur des habitants sont une façon de vivre que le tourisme n'a pas encore réussi à pervertir. Même à Porto où cette mane est une chance pour le développement de la ville, mais pour combien de temps encore ? Le plus longtemps possible. C'est tout ce que je souhaite.

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Portugal


Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages mais à avoir de nouveaux yeuxMarcel Proust